Suite au refus, sur la base de l’article 32 du Code européen des visas, d’une demande de visa à validité territoriale limitée « pour raisons humanitaires, pour des motifs d’intérêt national ou pour honorer des obligations internationales », en application de l’article 25 de ce même Code des visas, une famille syrienne chrétienne d’Alep a introduit un recours tendant à la suspension, selon la procédure d’extrême urgence, de cette décision.
Préalablement, le Conseil estime qu’il convient de poser à la Cour constitutionnelle une question préjudicielle sur la recevabilité d’une demande de suspension en extrême urgence, introduite par un étranger qui ne fait pas l’objet d’une mesure d’éloignement ou d’un refoulement dont l’exécution est imminente. Dans l’attente de la réponse à cette question, le Conseil estime qu’ il y a lieu de poursuivre l’examen de la demande de suspension d’extrême urgence, au regard des exigences de fond.
En l’espèce, le Conseil relève qu’il ressort du dossier administratif, et notamment de la présence d’un cachet de sortie du Liban vers la Syrie, que cette famille se trouve actuellement en Syrie. Au vu de la situation générale en Syrie, telle que notamment présentée dans la requête, le Conseil observe que la partie requérante démontre à suffisance l’urgence de la situation des requérants et, partant, que la procédure de suspension ordinaire ne permettrait pas de prévenir efficacement l’imminence du péril.
S’agissant d’une argumentation développée dans le moyen, exposé dans la requête, le Conseil observe que la question qui lui est soumise porte sur la substance des « obligations internationales », auxquelles il est fait référence dans l’article 25 du Code européen des visas. Il estime qu’afin de pouvoir se prononcer à cet égard, une bonne compréhension du contenu et de la portée de l’article 25 de ce Code des visas, lu conjointement avec l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, prévue par l’article 4 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne, et le droit d’asile, garanti par l’article 18 de la même Charte, est requise. Il estime donc nécessaire de poser , selon la procédure d’urgence, s’agissant d’un « renvoi préjudiciel relatif à l’espace de liberté, de sécurité et de justice », les questions suivantes à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), en vue d'une décision préjudicielle de celle-ci :
« 1. Les « obligations internationales », visées à l’article 25, paragraphe 1, a), du Règlement n°810/2009 du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas, visent-elles l’ensemble des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l’Union, dont, en particulier, ceux garantis par les articles 4 et 18, et recouvrent-elles également les obligations auxquelles sont tenus les Etats membres, au regard de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et de l’article 33 de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés ?
2. A. Compte tenu de la réponse apportée à la question 1, l’article 25, paragraphe 1, a), du Règlement n°810/2009 du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas, doit-il être interprété en ce sens que, sous réserve de la marge d’appréciation dont il dispose à l’égard des circonstances de la cause, l’Etat membre saisi d’une demande de visa à validité territoriale limitée, est tenu de délivrer le visa demandé, lorsqu’un risque de violation de l’article 4 et/ou de l’article 18 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union, ou d’une autre obligation internationale auquel il est tenu, est avéré ?
B. L’existence d’attaches entre le demandeur et l’Etat membre saisi de la demande de visa (par exemple, liens familiaux, familles d’accueil, garants et sponsors, etc.) a-t-elle une incidence sur la réponse à cette question ? »
Le Conseil constate que l’introduction de ces questions entraîne la suspension de la procédure dont est saisi le Conseil, jusqu’à ce que la CJUE ait statué, et que cette suspension a pour conséquence qu’il n’est pas en mesure de se prononcer sur le sérieux du moyen ni sur la réalité du risque de préjudice grave difficilement réparable, invoqué, et partant, se voit provisoirement empêché de se prononcer sur la demande de suspension de l’exécution des actes attaqués et sur la demande de mesures provisoires de la partie requérante. L’arrêt prononcé procède dès lors à une réouverture des débats (CCE 8 décembre 2016, n° 179 108).
L’interprétation donnée à l’article 25, §1, a) du Code européen des visas par la CJUE dans son arrêt sera revêtue de l’autorité de la chose interprétée et les juges nationaux des Etats membres de l’Union ne pourront plus appliquer cette disposition dans un sens différent de celui dégagé par la CJUE.